Fermeture d’une chaîne de TV privée algérienne après une interview avec un ex-chef du FIS
Le ministère algérien de la Communication a décidé de fermer la chaîne de télévision privée El Watan TV quelques jours après la diffusion par cette dernière d’un entretien avec Madani Mezrag, un ancien chef du Front islamique du Salut (FIS, dissous).
De nombreux policiers ont investi lundi matin les locaux de la chaîne, saisi les caméras et le matériel audiovisuel et ordonné au personnel de quitter les lieux, avant de mettre sous scellés les locaux de la chaîne, précise la chaîne appartenant à un homme d’affaires proche du parti islamiste, le Mouvement de la société pour la paix (MSP, opposition).
Le ministère de la Communication a justifié cette mesure par la situation de la chaîne qui « exerce d’une manière illégale et diffuse, de surcroît, des contenus subversifs et portant atteinte aux symboles de l’Etat ».
Le directeur d’El Watan Tv a été convoqué le 6 octobre au ministère de la Communication pour s’expliquer sur l’interview avec Madani Mezrag, l’ex-chef de l’armée islamique du salut, bras armé du FIS dissous, dans lequel il a tenu « des propos menaçant » envers le président algérien Abdelaziz Bouteflika. Une plainte a même été déposée au niveau de la justice.
Le 28 septembre dernier, le président Bouteflika avait rejeté dans un message publié à l’occasion de la célébration du 10e anniversaire de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, la demande de Mezrag de créer un parti politique.
« On va lui rappeler notre réponse de 2009, et s’il ne revoit pas sa position, il va entendre de moi ce qu’il n’a jamais entendu auparavant », a répliqué Mezrag dans cet entretien.
Malgré ce refus, l’ex-émir de l’AIS repenti a affirmé qu’il va présenter « un dossier complet au ministère de l’Intérieur et qu’il ne reçoit d’ordre de personne ». « Celui qui va me donner des ordres n’est pas encore né », a-t-il déclaré.
C’est la deuxième fois que les autorités ferment une télévision privée. En pleine campagne électorale pour la présidentielle de 2014, des gendarmes ont fait irruption, le 11 mars de la même année, dans les locaux de la chaîne Atlas TV et confisqué son matériel. Le lendemain, la chaîne a cessé d’émettre.
Atlas TV, dont la fermeture a été condamnée par de nombreuses organisations internationales, s’était distinguée par la couverture non-stop des manifestations organisées par le mouvement « Barakat » (ça suffit) contre la candidature du président Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat, lors du scrutin du 17 avril 2014.
En réaction, Amnesty International, qui a fustigé la fermeture de cette chaîne de télévision, a indiqué que cette dernière a été « sanctionnée pour ses critiques envers les autorités », rappelle-t-on.